Saltimbanques, François Pierretti

Couverture sur fond rouge d'un homme noir en contre-plongée. Roman saltimbanques
Saltimbanques, François Pierretti

Plusieurs années auparavant, j’avais suivi mon père sur un long trajet, vers Clermont-Ferrand. Parfois il me laissait tenir le volant sur les quatre voies vides du Sud-Ouest, de longs parcours, la lande entrecoupée seulement de scieries et de garages désolés, au loin. Je conduisais de la main gauche, ma mère ne savait pas que j’étais monté devant. C’était irresponsable de sa part, mais la transgression alliée à l’excitation de la route me donnait l’impression d’être adulte, pour quelques kilomètres. Mon père en profitait pour se rouler de fines cigarettes qu’il tenait entre le pouce, l’index et le majeur. Sa langue passait deux fois sur la mince bande de colle. Il venait d’une génération qui ne s’arrêtait pas toutes les deux heures pour faire des pauses et voyageait souvent de nuit. J’avais un jour vu le comparatif d’un crash-test entre deux voitures, l’une datant des années quatre-vingt-dix et l’autre actuelle. Mon frère et sa vieille Renault n’avaient eu aucune chance.

Saltimbanques, François Pierretti, éditions Viviane Hamy, 2019

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  1. J’ai été embarquée avec Nathan dans cette quête, ce deuil impossible, cette vie dissolue. Les personnages sont attachants et leur confusion est très bien traduite par une écriture qui m’a plue. Un beau roman qui m’a fait penser à des romans initiatiques. En quête de lui-même, en quête de deuil, Nathan rencontre des individus aussi paumés que lui. Une belle lecture, qui sera très probablement dans mes coups de cœur de l’année.

  2. Début difficile, j’ai bien failli laisser tomber me sentant prise en otage d’une complaisance à la dénégation de soi et à la dépression difficilement supportable. Dommage, j’ai du mal à croire à ce personnage si absent à lui-même et qui pourtant parle si bien… je crois que si le livre avait écrit à la troisième personne, il, Nathan, m’aurait été plus vite sympathique.
    Mais… petit à petit un charme se dégage, quand arrivent les saltimbanques, quand Nathan prend plus de corps, quand un chemin se trace. Et si par extension « saltimbanque » est aussi « gens du voyage », relié par la même errance, l’auteur crée ainsi un joli pont entre les deux frères.
    J’ai fini le livre émue. C’est une belle écriture.

  3. L’écriture est fluide et nous emmène dans la quête de Nathan qui vient de perdre son jeune frère prématurément. Nous le suivons dans ses rencontres passionnées, également dans ses périodes de solitude et l’on assiste à sa reconstruction personnelle. Les personnages sont attachants, l’atmosphère émouvante et le lecteur reste accroché jusqu’au bout du récit.

  4. Marie-Séverine
    dit :

    « Saltimbanques » est un roman mettant en scène un jeune homme, Nathan, qui retourne dans le village de son enfance à l’occasion de la mort de son frère âgé d’une vingtaine d’années.
    Nathan part alors à la découverte d’un inconnu, ce frère qu’il n’a pas vu grandir puisque parti de chez lui lorsque ce dernier avait huit ans. Il vit au jour le jour, trouve refuge auprès de ses amis qu’il rencontre et fuit sa maison dans laquelle le silence de ses parents est oppressant.
    Les personnes qu’il croise sur son chemin sont comme lui, paumées, avares de paroles et désemparées. Elles subissent leur vie plus qu’elles ne la contrôlent.
    Malgré tout, l’auteur sait rendre ses personnages attachants grâce à une écriture fluide et beaucoup d’empathie pour eux. C’est pourquoi, nous refermons ce livre à regret laissant Nathan à sa reconstruction après ce difficile travail de deuil.

  5. Comment faire le deuil d’une personne qu’on a si peu, si mal connue ? Et comment le vivre, surtout, quand cette personne est son propre frère ? C’est à une telle situation (« je sentais l’impossibilité de pleurer cet homme que je ne connaissais pas ») que Nathan, le narrateur, se trouve confronté quand il revient chez lui pour l’enterrement de Gabriel, ce frère qui n’avait que huit ans lorsqu’il a, lui l’aîné, quitté la maison, pour échapper à un père qui ne le comprenait pas, à une vie qui n’était plus la sienne. Gabriel vient de mourir, à dix-huit ans, dans un accident de voiture ; Nathan, qui a vingt-huit ans, vit à Paris de petits boulots sans intérêt. Et le voilà à nouveau sur les lieux de son enfance, où il cherche à savoir qui était Gabriel, en rencontrant ses amis, et son amie Apolline, devenus tous plus ou moins jongleurs, « saltimbanques » bientôt en tournée… Mais au fil de sa quête, il se rend à l’évidence : « je commençais à comprendre que je ne retrouverais jamais mon frère, qu’il avait disparu en emportant ses manies et ses habitudes. » Il finit par aider un vieil homme, Christian, rencontré près d’un phare en Bretagne, à ranger ses papiers et sa mémoire avant sa mort. Mais c’est à l’avenir que l’auteur choisit de donner le dernier mot : le roman s’ouvre sur une nouvelle vie, peut-être, avec l’ami Bastien… Roman de la quête, mais aussi de l’errance, du doute et de l’espoir, en un style sensible, d’ombres et de lumières.

  6. Pas mal. L’auteur sait écrire, bien qu’il ait des formules contestables (« Il me jette un regard noir et ma monnaie sur le comptoir »). Son frère meurt en fêtant le résultat du bac : il lâche tout pour comprendre ce qu’a été la vie de son frère. Des personnages attachants, dévoués.
    Pas inoubliable pourtant

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